Jérôme LORIAU

La réponse de Jérôme LORIAU à nos questions sur la pollution sonore nocturne (12ème circo)

Voici la réponse à nos questions de Jérôme LORIAU, condidat Les Républicains et Centristes aux législatives dans la 12ème circonscription de Paris (75007 et 75015) :

Madame, Monsieur,

Je vous remercie pour votre interpellation et souhaite y répondre très clairement, tant la pollution sonore fait partie intégrante des problématiques liées à la santé environnementale. Comme toute problématique, elle ne peut néanmoins se limiter à son impact premier, car ses causes et leur résolution impliquent de nombreux autres acteurs, dont les restaurateurs qui sont au cœur de l’économie de service parisienne.

Au sujet du Droit au Sommeil :

Êtes-vous d’accord avec le fait que la pollution sonore nocturne soit un problème de santé publique et qu’il n’est pas acceptable de laisser des Français privés de sommeil par des tiers plusieurs fois par semaine sans protection efficace des autorités ? Élu député, pensez-vous que vous pourriez mettre en place un dispositif permettant d’apporter des solutions rapides et durables aux victimes de privation de sommeil par le bruit ?

Bien évidemment. Sauf contexte particulier, les nuisances fortes, répétitives et tardives font partie des dossiers relatifs à la vie en collectivité les plus urgents. Car plus que le sommeil, elles dégradent les relations entre habitants et usagers de la ville, là où le respect d’un règlement plus clair pourrait apaiser les tensions et rendre les nuisances ponctuelles acceptables.

J’agirai sur ce point. Mais j’assume avant toute chose regretter, une fois encore, l’inaction de la maire de Paris. La situation parisienne relève de sa responsabilité. Un argument de plus, s’il en fallait, pour défendre à l’Assemblée une réforme complète du Statut de Paris et donner plus de compétences aux arrondissements qui auront les moyens d’agir au cas par cas.

Au sujet de la politique de lutte contre la Pollution Sonore :

Êtes-vous d’accord avec l’idée que pour lutter contre la pollution sonore, il faut mettre en place des moyens équivalents à ceux de la lutte contre la pollution atmosphérique, comme :

  • Des études pour mieux connaître les sources de pollution sonore,
  • Un Programme national de surveillance « pollution sonore et santé »,
  • La définition de valeurs cibles à ne pas dépasser,
  • Un observatoire en temps réel de la pollution sonore,
  • Des campagnes d’informations et de prévention.

La définition de valeurs cibles est une mesure qui peut apporter des critères factuels et précis dans la lutte contre les nuisances sonores. Mais on sait la difficulté de la faire corréler avec la réalité, tant les nuisances peuvent être ponctuelles tout en étant répétitives et de fait difficilement mesurables objectivement dans l’instant. Auprès du grand public, des campagnes de prévention sont nécessaires. Les groupes d’amis qui festoient la nuit en pleine rue oublient souvent le cadre dans lequel ils circulent, par exemple car leur présence à Paris peut être liée à un déplacement touristique, et donc à une recherche d’amusement. La prévention auprès des Parisiens, des jeunes et des touristes par l’intermédiaire des hôteliers peut être efficace. Enfin, il est en effet nécessaire de mener des études pour mieux connaître ces nuisances, afin que les mesures soient mieux ciblées et que leurs externalités ne soient pas infondées. Il ne faudrait pas interdire pour interdire ; mais simplement rechercher un meilleur équilibre.

Au sujet de la Police et des Amendes :

Les effectifs de Police sont restreints à Paris comme ailleurs, particulièrement la nuit. Ceux qui font du bruit savent qu’ils ont peu de chance d’être verbalisés. Êtes-vous d’accord pour augmenter le montant des amendes pour tapage (68 € actuellement) et pour non-respect du règlement des terrasses (35 € actuellement) ? Quelles solutions préconisez-vous pour une meilleure application de la loi ?

Je ne peux répondre à cette question sans évoquer certains points relatifs aux effectifs de police. Ils sont en effet restreints, à la fois car le gouvernement d’Emmanuel Macron, qui a confirmé le Ministre dans son poste, s’est laissé submerger par l’insécurité et ne priorise pas les ajustements voire réformes nécessaires, mais aussi car la création de la police municipale parisienne s’est faite trop tardivement, trop difficilement et sans moyen – elle n’est pas armée – menant à une sur-mobilisation des effectifs de la police nationale sur des sujets liés à la vie municipale. Aussi, l’image de ces mêmes effectifs s’est vue dégradée lorsque le gouvernement actuel, lors de la crise du covid, a préféré les coups de com face caméra en montrant des policiers vider des terrasses, plutôt que d’annoncer simplement une mesure et la faire respecter dans le calme, dans le consensus, et sans média. De fait, l’impact même de la police pour faire régner l’ordre sur les espaces extérieurs a été marqué par cette période encore ancrée dans les mémoires.

L’augmentation du tarif des amendes peut être étudiée, c’est à la Ville d’agir en fonction des réalités locales. Comme souvent cependant, c’est la chaîne de décision et d’action qu’il s’agit de réformer et non seulement la punition. Un tapage nocturne implique le déplacement d’une équipe de police pour un avertissement. Sous pression, elles sont moins disponibles pour ces désagréments. Il s’agirait de rendre plus aisées les plaintes a posteriori avec preuve et d’être en mesure de dépêcher des équipes municipales la nuit. Finie l’impunité.

Par ailleurs, sur les lieux de tapages extérieurs comme les terrasses qui seraient trop bruyantes, trop tard, des capteurs d’enregistrement devraient être installés en concertation avec la ville et la préfecture.

Au sujet de la Musique Amplifiée :

Actuellement, un établissement diffusant de la musique amplifiée doit réaliser une étude d’impact des nuisances sonores et isoler son établissement en fonction. Mais il s’avère que s’il ne l’a pas faite, la Police lui demandera de se mettre en règle, sans lui interdire de diffuser la musique qui gêne ses voisins. Or la mise en conformité peut durer des années. Etes-vous d’accord avec l’idée d’interdire la diffusion de musique tant que l’établissement n’a pas fait d’étude d’impact et les travaux d’isolation correspondants ?

C’est à la préfecture d’agir sur ce point, au cas par car. Mais nous devons lui donner les moyens de le faire. L’interdiction de diffusion peut en faire partie. Comme pour le reste : ce qui est insupportable doit cesser.

Actuellement, la réglementation n’impose pas de limites d’émergence des basses fréquences / infrabasses. Pourtant, de nombreuses personnes sont empêchées de dormir du fait de ces basses fréquences. Etes-vous d’accord pour limiter les émergences des basses fréquences / infrabasses ?

En fonction de l’isolation sonore de chaque établissement, les gammes de fréquences pourraient être plus ou moins étendues.

On observe fréquemment des groupes s’installer dans la ville avec des enceintes portables et des instruments de musique, rendant les journées et les nuits des riverains insupportables. Etes-vous d’accord avec l’idée d’interdire l’utilisation des enceintes portables dans l’espace public ?

Oui, mais il y a interdire et interdire. Un groupe de jeunes qui écoute de la musique sur les quais de Seine (espace public) n’a pas le même impact qu’un groupe qui écoute de la musique devant un immeuble (espace public là aussi).

Quand leur utilisation s’apparent à un tapage diurne (ou nocturne dans la rue), on en revient aux moyens d’agir, et même ici à la police de proximité : la police municipale. Il faut lui redonner le pouvoir de dialoguer, en renforçant ses effectifs et en répartissant mieux les taches entre la PN, la PM et autres forces de l’ordre. Alors, la PM pourrait rapidement émettre un premier avertissement, avant d’en venir aux sanctions, déjà existantes.

Au sujet des Terrasses :

Etes-vous d’accord avec l’idée qu’un gérant de bar-restaurant doit être responsable des bruits de sa clientèle en terrasse et devant sa devanture ?

Oui s’ils sont de son ressort et répétitifs, non s’ils sont le fait de fauteurs de troubles.

Êtes-vous d’accord avec l’idée qu’en cas de tapage constaté sur une terrasse, l’établissement, en tant que personne morale, doive payer des amendes dissuasives et graduées en fonction de son niveau de récidive ?

En lien avec la question précédente, il faut différencier la responsabilité de l’établissement et de l’usager. Il est préférable de réserver les sanctions administratives envers les établissements et les sanctions pénales envers les individus.

Aujourd’hui, des terrasses peuvent ouvrir sous la fenêtre des habitants jusqu’à 2h00 du matin. Etes-vous d’accord avec l’idée de fermer les terrasses au plus tard à 22h00 et d’inviter les clients souhaitant poursuivre la soirée à festoyer à l’intérieur des établissements ?

Lorsqu’elles le sont, c’est que c’est une ouverture historique. Cet avantage ne peut pas justifier d’abus, mais rompre des traditions historiques – qui précèdent souvent l’installation des habitants – ne serait pas justifié de manière générale. Il est néanmoins normal que dans le cas général les horaires soient règlementés et liés à une étude d’impact lors de l’installation de chaque établissement.

Etes-vous d’accord avec l’idée que l’espace public alloué aux terrasses ne devrait pas dépasser 50 % de la largeur utile du trottoir et qu’il devrait être défini en fonction de l’intensité de la circulation piétonne ?

La bonne disposition des terrasses, sans cadre restrictif ou normé, pourrait être garantie par une déconcentration réelle des pouvoirs d’allocation de l’espace public vers les mairies d’arrondissement. Ainsi, ce serait aux services locaux de juger de la bonne installation des terrasses. Vous le citez en effet, ce peut être en fonction de l’intensité de la circulation ou encore de la configuration de l’espace considéré.

Etes-vous d’accord avec l’idée d’interdire la consommation d’alcool debout devant un bar-restaurant afin de préserver la tranquillité du voisinage ?

C’est un fait limité à quelques places ou rues parisiennes. Dans le 15e quasiment inexistantes. Nous en avons néanmoins un exemple souvent évoqué par les habitants. Je ne voudrais pas me répéter, et je pense que ces cas doivent être traités de la même façon que les cas précédemment cités. On en revient au même triptyque : plus de moyens, plus de compétences aux arrondissements, moins d’impunité pour plus de comportements positifs autonomes.

La consommation debout entre la terrasse et le restaurant n’est pas gênante, néanmoins si elle crée une « terrasse humaine », cela devient une occupation illégale de l’espace public.

Etes-vous d’accord avec l’idée d’un permis à points Terrasses qui permettrait de retirer une autorisation de terrasse dès la 3ème verbalisation pour non-respect du règlement terrasse, afin de mieux inciter les gérants à respecter ce règlement ? Que recommandez-vous pour mieux faire respecter le règlement terrasses ?

Commençons par appliquer les mesures déjà applicables. Si elles se révélaient insuffisantes une fois réellement mises en place, nous pourrions penser à des mesures plus innovantes.

Au sujet des lois relatives à l’Alcool :

  1. Etes-vous d’accord avec l’idée de limiter les transferts de licences de bars-restaurants d’hôtels au sein d’un même département et de voter une loi permettant les transferts de licences de Paris vers les départements limitrophes afin de désengorger certains quartiers de Paris devenus rues de la soif ?
  2. Etes-vous d’accord avec l’idée qu’il faut empêcher l’installation de nouveaux bars-restaurants et bars- restaurants d’hôtels dans les arrondissements déjà saturés (ex : 2ème : 1 bar-restaurant pour 30 habitants, 10ème : 1 pour 86 habitants. Objectif de la loi sur les licences : pas plus de 1 pour 450 habitants.) ?
  3. Aujourd’hui, un petit PMU de 20 places peut revendre sa licence IV à un bar-restaurant de 300 places, soit 15 fois sa capacité. Pensez-vous qu’il faille revoir le système de licences IV et y intégrer la notion de nombre de places (intérieur et terrasse incluse) ?
  4. Certains quartiers sont victimes de monoactivité bistrotière. L’octroi de terrasses faisant augmenter le chiffre d’affaires des cafés-restaurants, ils participent à l’augmentation des baux commerciaux du quartier et évincent les petits commerces de proximité moins rentables. Que proposez-vous pour y remédier ?
  5. Les épiceries ouvertes la nuit permettent d’acheter de l’alcool après 22h00 et favorisent l’implantation de personnes alcoolisées et bruyantes pendant la nuit sous les fenêtres des riverains. Etes-vous d’accord avec l’idée d’interdire la vente d’alcool en ville après 22h00 et de fermer administrativement tout établissement ne respectant pas cette règle ?
  6. Les Alcoolisations Ponctuelles Excessives ne cessent d’augmenter chez les jeunes en France, et particulièrement à Paris. Pensez-vous qu’il faille faire quelque chose contre cela et si oui quoi ?

Pour répondre aux questions précédentes. Il faut tout d’abord rappeler qu’il est complexe d’endiguer le l’adéquation de l’offre à la demande. S’il y a des zones particulièrement riches en bistrots, c’est car la demande – touristique et locale- y est forte. Nous ne pouvons pas imposer un déplacement de ces aires, cela ne ferait d’ailleurs que déplacer le problème…

Le levier sur lequel il faut agir, c’est la prévention. Je suis médecin, et le premier témoin des dégâts que l’alcool cause : au cours de la vie (addiction, atteintes au foie, …) ou même jeune (atteintes psychologiques, dépendance, troubles de la concentration, …). Le vin est notre boisson nationale mais n’est pas de l’eau, l’alcool amuse mais rend la vie plus courte. C’est aussi simple que cela, et c’est un message qu’il faut à nouveau faire passer.

Si nous voulons désengorger l’hôpital, il faut prévenir plus, prévenir mieux.

Pourquoi cette disgression ? Car cela aura aussi un impact sur les terrasses et les bistrots. Les licences ont pour objectif en partie de limite la consommation d’alcool sur une zone précise, ou de la contrôler. Cela n’empêche ni les consommateurs d’acheter ailleurs, ni de consommer beaucoup sur les lieux existants.

Responsabilisons la société comme nous savons le faire sur tant de sujets.

Même topo pour la limitation à 22h. J’y suis favorable dans le cas des commerces, car elle fait partie d’une meilleure sécurisation de Paris la nuit. Mais la consommation d’alcool reste possible en terrasse, restaurant ou même sur les nouveaux livreurs en ligne… Sur ce dernier point précisément, il y a un débat à ouvrir. L’absence de contrôle social lors de l’achat d’alcool en ligne désinhibe. Et donc redonne du carburant à la hausse des consommations.

Au sujet de la politique de lutte contre le crack et d’accompagnement des toxicomanes :

19. Etes-vous d’accord avec l’idée qu’il faut investir et développer en urgence des communautés thérapeutiques loin des zones urbaines pour soigner les accros au crack et leur permettre de se sevrer et de retrouver la santé ? Que préconisez-vous pour lutter contre le crack ?

La question de la lutte contre les toxicomanies est complexe et nécessite en soit une remise à plat totale de la prise en charge. Je serai amené à développer ce projet ultérieurement, dans le cadre d’échanges spécifiquement dédiés à la ces questions. Si je comprends le lien avec les nuisances sonores éventuelles, cela s’éloigne du cadre de la lutte contre le bruit et je préfère centrer mes réponses à ce questionnaire sur ce sujet.

Néanmoins, mes grands axes dans la lutte contre la toxicomanie et le crack sont la garantie de la sécurité des riverains, et cela passe par une politique intérieure plus ferme et pénale plus efficace, l’impunité zéro pour les trafiquants, et la refonte d’une politique de soin envers les toxicomanes afin de réduire les risques associés de sécurité.